BAYE NIASS: UN MAÎTRE SOUFI

Né en 1900 dans le village de Taïba Niassène, situé entre la ville sénégalaise de Kaolack et la frontière gambienne, Ibrahim Niasse est le fils d’Abdoulaye Niasse (1840-1922), éminent représentant de l’ordre soufi Tijānī, également connu sous le nom de Tareeqat al-Tijjaniyyaa, dans la région du Saloum au début du XXe siècle. Durant sa jeunesse, Ibrahim déménage avec son père à Kaolack, où ils fondent la zāwiya de Lewna Ñaseen, un centre religieux d’importance.

À la mort de son père en 1922, son frère aîné Mouhammad (Khalifa) assume la direction de la communauté des “Niassènes”, tandis qu’Ibrahim enseigne dans les écoles coraniques de son père à Taïba, Kossi et Kaolack. Sa profonde érudition et sa dévotion attirent rapidement de nombreux disciples. Dès 1930, il se déclare l’héritier spirituel d’Ahmed Tijani et rallie massivement les disciples de son père ainsi que de nombreux cheikhs maures à sa cause, les initiant à la Tarbiyya (initiation mystique) visant à atteindre la gnose, marquant ainsi la spécificité de sa branche de la Tijaniyya. Son premier ouvrage, Rûh al adab, rédigé à l’âge de 21 ans, ainsi qu’un traité soufi et tidjanien intitulé Kâshif al ilbas en 1930, témoignent de ses connaissances ésotériques acquises précocement.

Cependant, sa renommée demeure limitée jusqu’en 1937, année où il effectue son premier pèlerinage à La Mecque et rencontre l’émir de Kano, Abdullahi Bayero, qui renouvelle son affiliation à la Tijaniyya auprès de lui et l’invite à Kano. Il gagne alors l’adhésion de la majorité des oulémas de la Tijaniyya, qui deviennent les promoteurs de son mouvement dans toute l’Afrique de l’Ouest après la Seconde Guerre mondiale. À la mort de l’émir Abdoulahi Bayero en 1953, son fils Mouhamed Sanuss lui succède et renforce les liens avec Ibrahim Niasse.

 

À la fin des années 1960, grâce à ses soutiens politiques, à l’engagement de ses disciples au nord du Nigeria, à ses activités éducatives et à son zèle missionnaire, Ibrahim Niasse dirige une communauté transnationale de plusieurs millions de membres, présents notamment au nord du Nigeria où son influence est la plus forte, mais aussi au Ghana, au Niger, au Togo, au Liberia, au Sierra Leone, au Tchad, au Cameroun, en Gambie, en Mauritanie et dans la région du Sine Saloum. Actuellement, ce mouvement s’étend également aux États-Unis, en Asie et dans les pays du Golfe.

 

Niasse fut le premier Africain de l’Ouest à accéder à la direction de la prestigieuse mosquée al-Azharen Égypte, où il acquit le titre honorifique de « Cheikh al-Islam ». Sa proximité avec de nombreux leaders des mouvements de libération en Afrique de l’Ouest découle de son rôle crucial dans l’émancipation des États africains. Il entretenait une amitié étroite et prodiguait ses conseils au premier président du Ghana, Kwame Nkrumah, ainsi qu’à Gamal Abdel Nasser et au roi Fayçal d’Arabie saoudite. Ibrahima Niasse occupa également le poste de vice-président de la Ligue islamique mondiale, sous la présidence de Fayçal

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